Aldo Naouri... Oui, c'est ce fameux pédiatre psychanalyste, spécialiste des relations intra-familiales, qui dérange parfois en militant pour les pères, en s'interrogeant sur la tyrannie de la mère ou sur l'éducation des enfants où tout se joue, selon lui, dès les premières années...
J'avoue, je ne l'ai pas lu mais j'avais entendu parler de lui et dans une émission de radio, notamment de son bouquin "Les filles et leurs mères"... que Chrystel m'avait résumé par ce raccourci : "si tu accouches d'une fille, c'est que tu n'as pas résolu tes problèmes avec ta mère"... Ça m'avait marquée, énervée, contrariée... comment peut-on être si déterministe, c'en est déprimant d'être une fille ! Aujourd'hui, je n'ai toujours rien lu de lui mais j'ai entendu une nouvelle émission radio en 2 entretiens...
C'est un " homme qui vient de très loin et qui, 76 ans plus tard, n'est toujours pas arrivé quelque part. Le pédiatre Aldo Naouri est toujours en mouvement et a accepté de raconter son enfance et son parcours extraordinaire dans un livre-entretien avec Émilie Lanez, journaliste du Point : Prendre la vie à pleines mains... Au fil des pages, on comprend mieux ses positions sur le rôle du père, de la mère, de la place de l'enfant. Aldo Naouri, orphelin de père, une mère conteuse et aimante, petit dernier très choyé d'une fratrie de 7 enfants, raconte comment sa famille a été sa première école, celle du lien social, une famille où le maître-mot était "solidarité". De l'alibi, à l'Algérie, à la France, en passant de statut de réfugié, à sinistré, à celui de rapatrié, Aldo Naouri raconte les moments-clés de sa vie qui éclairent si bien sa clinique singulière. " {Marie-Pierre Planchon}
Dans ces 2 x 55 minutes, j'ai choisi - parmi plein d'autres thèmes passionnants - un moment, un extrait particulièrement émouvant...
--> Vous dîtes que vous êtes restés un éternel migrant jusqu'au jour où vous avez rencontré votre épouse. Qu'est-ce que ça a changé dans votre vie et cette solitude que vous ressentiez ?
" Le jour où j'ai rencontré mon épouse, j'ai eu l'impression, je me suis dit, je suis arrivé dans le lieu dont je rêvais. Pourquoi ? Tout simplement parce que mon épouse était d'une beauté extraordinaire, d'une intelligence hors du commun, et elle était dotée de toutes les qualités. Et je me suis dit que si jamais je pouvais, éventuellement, m'unir à une femme comme celle-là, je pourrais conquérir le monde.
Elle a elle-même accepté de s'unir à moi, pour une raison simple, c'est que j'arrivais avec un courage et une détermination qui lui était totalement étrangère parce qu'elle était encore dans le brouillard de la Shoah. Et vous savez, cette génération a beaucoup payé, énormément payé. Et nous avons vécu la plus belle des vie qui puisse exister. Nous avons vécu ensemble 54 ans. Elle est décédée brutalement cet été et je ne m'en relève pas, voilà. Elle était une déracinée, j'étais un déraciné et nous nous sommes enracinés l'un dans l'autre. "
--> Ça veut dire quoi s'enraciner l'un dans l'autre ?
" Elle est ma patrie, je suis sa patrie. Nous sommes tellement dans une intimité jonctionnelle que, au fond, nos origines, nos pérégrinations, nos migrations, etc, etc, prennent un autre statut. Tout cela a eu pour fonction de nous amener l'un face à l'autre, l'un avec l'autre. Et c'est de cette union, l'émerveillement qui a surgit a été tel qu'en définitive, le passé de son côté douloureux n'avait plus aucune espèce d'importance. Alors évidemment, nous sommes restés très affectés par les égratignures que nous avons reçues par la traversée de ces paysages, de ces événements, mais nous avons construit quelque chose de formidable ensemble. "
--> Vous dîtes que vous êtes devenu ce que vous êtes devenu grâce à elle.
" Oui tout à fait et je le dis quand je dis qu'au moment où je la rencontre, si j'arrive à faire en sorte que cette femme s'intéresse à moi et m'accepte, je crois que je pourrais conquérir le monde. Et donc, elle m'a accepté et j'ai rempli mon marché, c'est-à-dire que j'étais prêt à tout pour elle. Et ça, j'en ai tiré un enseignement théorique, qu'en réfléchissant, par exemple, au lien des hommes et des femmes, tout au long du groupe féminin et du groupe masculin, tout au long de l'histoire de l'espèce, on s'aperçoit d'une chose, c'est qu'il existe une caractéristique féminine flagrante que vous pouvez retrouver partout, que vous soyez homme ou femme, c'est l'insatisfaction. Hé bien cette insatisfaction, c'est un défi pour un homme. Il va tenter de faire en sorte d'être lui celui qui va permettre la satisfaction, à une femme d'être satisfaite. Et pour cela, justement, il va conquérir le monde. Sans les femmes, jamais Christophe Colomb n'aurait découvert l'Amérique. Et jamais Magellan n'aurait découvert son détroit. Et jamais rien ne se serait produit dans l'histoire humaine du côté des hommes. Il y a là, dans l'insatisfaction féminine quelque chose qui est profondément civilisateur par le défi qu'elle lance. Et mon Dieu, c'est dynamogène !
Évidemment, vous allez me dire que je raconte des salades car aujourd'hui, le mot d'ordre, c'est si jamais elle n'est pas satisfaite, tu la jettes et tu en prends une autre. Mais bien sûr, c'est comme ça qu'on massacre les gens, en leur donnant des avis de cet ordre-là parce que bien sûr il peut la jeter et en prendre une autre mais elle sera aussi insatisfaite et quand il en sera à la 5e insatisfaite, c'est lui qui s'attaquera à lui-même en se disant qu'il n'est pas capable de la satisfaire, qu'il est une merde... et puis il cherchera dans la drogue ou etc. C'est comme ça qu'on détruit une humanité alors que si jamais on montre comment les choses se passent, comment les liens se tissent, comment les échanges se fabriquent et s'instaurent, dans cette différence tellement formidablement importante, là on est dans des processus qui sont des processus civilisationnels. Et on avance. "
J'trouve ça beau, enfin... très prince charmant, conte de fée, fleur bleue, quoi !
... en attendant d'enfin le lire !
Partir avec Marie-Pierre Planchon, l'émission du lundi 6 mai 2013 : Aldo Naouri (1)
Partir avec Marie-Pierre Planchon, l'émission du lundi 13 mai 2013 : Aldo Naouri (2)
Biblio :
Prendre la vie à pleines mains, Odile Jacob, 2013.
Éduquer ses enfants : l'urgence aujourd'hui, Odile Jacob, 2009.
Les pères et les mères, Odile Jacob, 2004.
Les filles et leurs mères, Odile Jacob, 2000.
Le couple et l'enfant, 1995.
France inter, Eva Bester, Remède à la mélancolie, di. 6 mars 2016.
Autre billet : 
Du troupeau la génisse lente à fougère dorée
Anna Ternheim à l'émission "
Un resto chez Christo un soir, à ma place préférée, sous l'impressionnante infâme tête de veau, et on attise le feu, on jette les bases d'un projet ô combien... ambitieux... Va bien falloir prouver que ce n'est pas que d'la gueule !
Un retour de we polo NF à Château-Thébaud et comme il faut bien s'occuper sur la route, d'une voiture à l'autre... on fait monter la pression, la "fin d'année" approchant et nos plannings de ministres, on échafaude des plans... Objectif : organiser un we d'équipe où - je ne sais pas pourquoi - le but ultime transcende l'amélioration, le perfectionnement de notre pratique polo en terme de jeu technique, stratégique et collectif pour aller vers l'accompagnement individuel...
Au programme : ski nautique avec Gaëlle, ballade parisienne avec thème (pas cher, insolite, chic... ) et moyen de locomotion (pieds, vélo, roller) à choisir. Etc. Etc. A chaque activité, son lot d'invités masculins...
