Oubangui-Chari quoi ?
Par Tat le jeudi, octobre 24 2013, 03:15 - Palabres - Lien permanent
On n'a jamais fini d'apprendre sur l'histoire de l'empire colonial français,lde la présence française dans le monde mais en Afrique, elle est encore plus méconnue qu'ailleurs, me semble-t-il...
En répondant à une requête de type généalogique pour un administrateur de Génériques en lien avec l'Algérie française, j'ai pu tomber sur l'info suivante (qui n'a rien à voir) :
A côté de l'Algérie, des Comores, de Madagascar, du Congo, du Gabon, du Tchad, de la Mauritanie, du Bénin, du Burkina Faso, de la Côte d'Ivoire, de la Guinée, du Mali, du Maroc, du Niger, du Sénégal, de la Tunisie... qui sont autant de noms connus (à défaut de connaître leur histoire... ), qui connaît donc l'Oubangui-Chari ??
Okey okey, j'avoue, c'est certainement moi qui suis ignare...
L'Oubangui-Chari, colonisé par les Français à la fin du XIXe siècle, est devenu République centrafricaine le 1er décembre 1958 ; le pays a proclamé son indépendance le 13 août 1960
(in Myriam Provence, Rechercher ses ancêtres, Paris : Éditions Autrement (coll. Généalogies), 2008, p. 40).
À partir du XVIIe s. et surtout du XVIIIe s., le pays est ravagé par diverses épidémies puis par la traite esclavagiste arabe et ensuite européenne. Les premiers colons et missionnaires ont foulé la terre centrafricaine en 1884. Ce territoire fait partie du Congo français jusqu'en 1894 où il devient une colonie à part entière. Puis, le territoire est disputé entre Allemands, Belges, Britanniques et Français et, après de multiples traités, la France finit par obtenir le territoire en 1903 suite à la défaite des troupes égyptiennes. L'Oubangui se révèle, en effet, une voie de passage obligée vers le Nord dont la domination constitue une étape dans la construction de l'Empire colonial français, qui veut joindre, sans discontinuer, Alger, Dakar et Brazzaville. En 1911, l'ouest de la colonie est intégré au Cameroun allemand (redevenant français en 1919). En 1914, il est réuni au Territoire militaire du Tchad sous le nom d'Oubangui-Chari-Tchad. Après que le Tchad ait pris son autonomie en 1922, l'Oubangui-Chari est rattaché, en 1936, à l'Afrique équatoriale française (AEF). Enfin, le territoire devient autonome (1958) puis indépendant (1960) sous le nom de République centrafricaine.
Waoualouh !! Je comprends que Bangui, c'est la capitale ; que la population se répartit entre les "gens de la savane" et les gens du fleuve" ; qu'on y parle le sango et le français ; que l'Oubangui - outre qu'il est englobé dans la dénomination "Congo" - est une rivière et que, par ailleurs, le Chari est bien un fleuve qui y prend sa source pour se jeter dans le lac Tchad !
Aujourd'hui, la République centrafricaine est une énigme géopolitique. Après une histoire coloniale violente, suivie par une instabilité politique et militaire chronique, ce pays enclavé est en proie à des mouvements armés multiples, à la fois internes et externes. Une situation à l'origine d'une catastrophe économique, mais surtout humanitaire
(Le Dessous des cartes, Arte).
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21 octobre 1926: Massacre de Bodembéré (Oubangui-Chari)
Le chef Samba N'Goto vint une nuit raconter à Gide ceci :
« Le 21 octobre dernier [1926] le sergent Yemba fut envoyé par l'administrateur de Boda, nommé Pacha, à Bodembéré pour exercer des sanctions contre les habitants de ce village qui avaient refusé d'obtempérer à l'ordre de déménager leurs gîtes sur la route de Carnot, (Centrafrique actuelle) désireux de n'abandonner point leurs cultures. Ils arguaient, en outre, que les gens établis sur la route de Carnot ce sont des Bayas, tandis qu'eux sont des Bofis.
Le sergent Yemba pris avec lui trois gardes, un capita et deux hommes commandés par ce dernier. En cours de route, le sergent Yemba réquisitionna deux ou trois hommes dans chaque village traversé, et les emmena après les avoir enchaînés. Arrivés à Bodembéré, les sanctions commencèrent: on attacha douze hommes à des arbres, tandis que le chef du village, un nommé Cobelé prenait la fuite. Le sergent Yemba et le garde Bonjo tirèrent sur les douze hommes ligotés et les tuèrent. Il y eut ensuite grand massacre de femmes, que Yemba frappait avec une machette. Puis, s'étant emparé de cinq enfants en bas âge, il enferma ceux-ci dans une case à laquelle il fit mettre le feu. Il y eut en tout, nous dit Samba N'goto, trente-deux victimes. »
Après son témoignage, Samba N'goto, de retour à Boda fut jeté en prison avec des membres de sa famille par Pacha qui partit en tournée avec le ci-devant Yemba. Gide transmit ce témoignage par lettre au Gouverneur qui ordonna une enquête administrative confiée à M. Marchessou qui confirma les faits. Le procès de Pacha aurait eu lieu (page 100, 466). Gide relata son voyage dans Le Populaire de Léon Blum. Le directeur de la Compagnie forestière Sangha-Oubangui répondit au journal. Il y écrit que ce Samba N'goto est un anthropophage avéré, commerçant en esclaves, pillard et voleur (page 460) et que pour les faits ci-dessus, il s'agit là d'une querelle de nègres (p 466).
Sources :
André Gide, Voyage au Congo, Gallimard, 1927, Idées n° 443, page 93.